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 CELLES

— La commune de Celles dépend de l'arrondissement et du canton de Murat. Allongée du nord au sud, elle est bornée au nord par celle de Chalinargues; au sud, par celle d'Ussel, appartenant à l'arrondissement de St-Flour; à l'est, par celles de Moissac et de Coltines, et à l'ouest, par les communes de Virargues et de la Chapelle-d'Allagnon.

La rivière d'Allagnon la traverse de l'ouest à l'est; elle est encore arrosée par les ruisseaux de Tissonnière et du Cheylar, qui la parcourent du nord au sud, et vont aboutir à la rive gauche de l'Allagnon; par celui de Couterées, qui naît à Ribette; par le ruisseau de Boutarel, qui prend sa source à la Champ, et par ceux de Chabizat et de la Prades; ces derniers coulent du midi au nord et vont, ainsi que les premiers, se déverser dans l'Allagnon , mais en l'atteignant à sa rive droite.

L'étendue de la commune est de 1,800 hectares, dont 1,200 hectares en terres cultivées d'assez bon produit; 500 hectares en prairies et pacages de bonne qualité; 50 hectares en bois; le surplus en terres vaines. La majeure partie s'étend dans les plaines de la Planèze; le surplus sur les versants de la vallée d'Allagnon. Par suite de cette disposition du sol, le territoire de Celles est productif en grains de bonne qualité, surtout en orges et en seigles; on y élève aussi quelques mulets; l'émigration complète enfin ses ressources. Sa population, d'après le dernier recensement, est de 653 habitants, répartis dans 8 villages, 4 hameaux et 164 maisons.

Celles, le chef-lieu, à 1 myriamètre de Murat, est situé sur une esplanade , à peu près à mi-côte du versant droit de l'Allagnon; il se compose uniquement de l'ancien château et de l'ancienne chapelle de la Commanderie, qui sert aujourd'hui d'église paroissiale. Le site occupé par cet édifice domine le vallon fort agréable et très-bien boisé dans cette partie; le château lui-même est surmonté par un bois d'essence de hêtre qui s'étend jusqu'à la plaine.

L'église est dédiée à saint Roch et à saint Illide; elle paraît remonter au XI° ou XII° siècle et appartenir au style roman. Il s'y trouvait une chapelle sous l'invocation de sainte Barbe. Durand Bertrand, curé de Celles, et le commandeur de La Rivière, firent remettre à neuf sa toiture. Le bénéfice de Celles était à la collation du grand-maître de Malte ; il était richement doté.

On ne retrouve pas l'époque de la première construction du château; mais il est au moins aussi ancien que l'église. Il fut démoli plusieurs fois pendant les guerres dont ces contrées furent le théâtre ; les Anglais le pillèrent en 1357, et il fut en partie rasé en 1360. Restauré quelque temps après, les gens de la nouvelle religion le prirent en 1588; mais ils en furent expulsés l'année suivante par le S' de Dienne, bailli des montagnes, qui fit prisonniers trois de leurs chefs. Pendant qu'ils occupaient la forteresse, les habitants du pays souffraient beaucoup de leurs exactions.

Ce château se composait, en 1775, de quatre corps de logis disposés en quadrilatère et dont l'un était occupé par l'église. Quatre tours, dont trois étaient carrées et dont la quatrième, de forme ronde, servait de clocher, flanquaient les quatre angles- Extérieurement ces bâtiments étaient défendus par un fossé large et profond qui en faisait le tour, et sur lequel on avait jeté un pont-levis; intérieurement se trouvait une vaste cour carrée fermée par une énorme porte en fer; au fond de cette cour était une cinquième tour hexagone, contenant l'escalier; cet escalier, en spirale, desservait les divers logements au moyen de deux galeries couvertes, destinées à servir de promenade dans les mauvais temps ; la rampe en était si douce, qu'on pouvait y monter et en descendre à cheval. L'un des corps de bâtiments appelé de Montbrison renfermait les armes des commandeurs de Celles; ce qui n'était pas occupé par les salles nécessaires était divisé en un grand nombre de cellules affectées aux chevaliers.

Le château existe encore aujourd'hui; mais sa disposition intérieure ne répond plus à sa destination première : les cellules, les salles, les dortoirs ont disparu et sont remplacés par des étables et des greniers à fourrage. Dans une salle qui a survécu, on voit un plancher dont les solives sont remarquables par leur grandeur et leur force : leur profil d'équarrissage porte au moins 66 centim. sur 50.

Celles avait été primitivement une commanderie des Templiers. Après la destruction de cet ordre, elle passa aux chevaliers de Malte.

La charte de Clovis mentionne en ce lieu deux métairies qui furent données par le roi au mois d'octobre 507, à Théodéchilde sa tille. Longtemps après, en 1212, nous trouvons un acte portant que Dalmas de Celles étant devenu veuf, se fit templier et donna ses biens à l'ordre du Temple, sous la condition d'y ériger une commanderie dont il serait le premier titulaire. Telle fut l'origine de cette commanderie.

En 1216, une donation fut fuite par Bertrand de Rochefort, chevalier, à Pierre de l'Espinasse, commandeur, de cent sols de cens sur le village de Seveirat, et au cas où ledit lieu viendrait à être abandonné et ne pourrait plus suffire au paiement desdits cent sols, le commandeur pourrait s'en emparer et le détenir jusqu'au paiement de cette redevance.

En 1640, frère Gaspard de Maisoncelle fit au seigneur de Mercœur la nommée des biens et fiefs de ta commanderie. Elle était fort riche et plusieurs manses et succursales en dépendaient, savoir : Tempel et Croute, à Bonnac ; Auriac, à Faverolles; Xarnhac, Pradels et Coltines.

Il existe aux archives de la préfecture de Clermont un terrier de cette commanderie.

Voici les noms des commandeurs connus:

1216. Guillaume Dclmas de Celle.

1241. Pierre de l'Espinasse.

1247. Bertrand de Itochefort.

1285. Bertrand de Sartiges.

1286. Robert Blanc.
1293. Durand Charnier.
1296. André Charnier.
1320. Giraud Chappel.
1537. Hugues de l'Espinasse.
1346. Guillaume de Châteauneaf.
1358. Guillaume de Dras.
1379. Béraud de Diennc.
1398. Jean Duhourg.
1412. Jean de Lastic, qui devint grand-maitre.
1130. Guillaume de Lastic, qui devint sénéchal.
1456. Guillaume de Pons.
I180. Gabriel d'Estaing.

1490. Guillaume de Pons.

1501 François Delage

1519. De La Forest.

1552. Jean de Rodde.

1543. Gabriel de l'Estang.

1558. Gilbert d'Isserpens.

1570. Antoine de Villemonteix.

1580. Claude de Torsiac .

1583. De Versac.

1594. Jean Dubourg.

1604. François de Bréchard de Bordes.

1610. Jean de Douhet de Merlat.

I61C. Antoine de Fraquières.

1626. Hector de La Rivière.

1640. Gaspard de Maisoncelle.
1644. Jean Chastel.
1660. De Buranture.
1668. De Faye de Gerlande.
1698. De St-Viance.
1700. Marie de Dolmieux.

1701. Philippe de St-Viance.
1726. De Vaugué de Gourdon.
1730. D'Aubéry de Valtan.
1753. Jacques de Frauchesse.
1756. Gilbert de Montagnac.
1760. De Frauchesse.
1765. De Bort de Pierrefitte.
1775. Aymé de Châteauneuf.
1789. De Cesselles.

Parmi les commandeurs, ceux dont les actes ont été conservés sont:

Guillaume Delmas de Celles, qui fonda la commanderie.

Bertrand de Sartiges, mentionné déjà pour la belle défense qu'il fit de son ordre, dans le célèbre procès qui lui fut intenté.

Giraud Chappel, qui eut, en 1332, des différends sérieux à cause de certaines dîmes avec Guillaume de St-Hilaire, prieur de Bredon. Il en a été dit un mot à la notice sur cette localité, ainsi que des hostilités qui en furent la conséquence. L'affaire fut portée devant Guillaume de Bonabent, bailli des montagnes, qui condamna le prieur à une amende de 40 livres pour avoir violé la sauvegarde du roi sous laquelle était la commanderie.

Guillaume de Dras, qui soutint avec énergie une attaque faite en 1362 contre la commanderie, par Guillaume de Cardaillac, vicomte de Murat, et les Anglais; il les repoussa avec perte et les maltraita beaucoup.

Beraud de Dienne, gouverneur de la Haute-Auvergne et bailli des montagnes, qui commanda la noblesse de 1379 à 1392.

Jean de Lastic, qui devint grand-maître de Rhodes, où il soutint un siége des plus opiniâtres; quoiqu'à demi-enseveli sous les ruines de cette ville , il parvint à repousser toutes les forces des musulmans.

Guillaume de Lastic, neveu du grand-maître, sénéchal de l'ordre, et qui en cette qualité commandait la flotte des chevaliers ; il se distingua pendant le siége, sortit du port avec sa flotte, en bonne ordonnance, et quoiqu'il eût beaucoup moins de vaisseaux que les ennemis, il ne laissa pas, dit l'historien de l'ordre, de s'avancer fièrement et fit battre en retraite celle des infidèles, qui ayant tourné les poupes du côté de terre, se contentèrent, pour éloigner les chrétiens, de faire un grand feu de leur artillerie.

Antoine de Villemonteix, commissaire de la noblesse en Auvergne.

Jean Dubourg, qui reçut les ligueurs dans la commanderie.

Enfin, Gaspard de Maisoncelle, qui profita du rétablissement de la tranquillité pour faire aux bâtiments de la commanderie, sous la direction du chevalier d'Anicroche , les grandes restaurations que les désastres occasionnés par une

longue suite de troubles avaient rendu nécessaires; il fit recueillir dans des

tuyaux de plomb la fontaine du château. On a conservé aussi le souvenir de quelques curés, savoir: Durand Bertrand, en 1636; François Rardou, en 1673; Antoine Nicolas,

en 1683; N. Vaissière, qui assista à l'assemblée dés Etats tenue en 1789 dans la

ville de St-Flour.

Les bâtiments de la commanderie appartiennent aujourd'hui à la famille Sarraille, qui y habite.

La commune de Celles était autrefois régie par le droit coutumier, à l'exception de Longue-Saigne, d'une partie de Beynac, de la Choulou, de Tourille et de Traverges, qui étaient de droit écrit.

Cette commune est traversée par la route départementale, n° 3, de Murat à Massiac, qui la suit sur une longueur de 2 kilomètres; enfin, elle est longée sur une étendue de 4 kilomètres environ par la route impériale n° 126; elle va l'être par le chemin de fer central.

Les villages et hameaux du territoire de Celles sont:

Beynac, gros village sur la plaine, non loin d'Ussel et de la route impériale. C'était un fief avec un château composé d'une grosse tour rectangulaire dont la construction parait remonter au XVI° siècle. Au bas de l'escalier de cette tour, était à gauche, en y entrant, une porte basse que M. Teillard-Beynac a fait murer; elle fermait l'entrée d'un souterrain qui se prolongeait, dit-on , jusqu'à Ussel. A l'appui de cette assertion, nous dirons qu'un éboulement s'étant produit il y a quelques années dans le tertre de la colline qui domine Ussel, laissa voir une excavation voûtée, dirigée vers Beynac. A quoi pouvait servir jadis ce souterrain, sinon à se procurer au ruisseau d'Ussel l'eau qui manquait dans le village, lorsque les pillards tenaient le pays?

Beynac faisait partie du mandement de Lesbros; il donnait : argent, 19 sols 9 deniers; froment, 1 sept. ; seigle, 2 sept., 2 q.; avoine, 1 sept. 4 q.; cire, 14 onces; vin, 2 sept ; poule, 1.

Le château appartenait primitivement à la famille de Ribes, dont il sera parlé plus bas. De Bégon de Ribes , mort sans postérité, ce fief passa dans la maison de Lastic. Etienne de Bompart, frère du grand-maître, en devint propriétaire; il Mit ensuite possédé par la famille du Jarrousset : Antoine du Jarrousset habitait Beynac avec Catherine de Julien, sa femme. Après sa mort, en 1583, dans une rencontre près de Vie, le château devint la propriété de la famille de Massebeau. Jacques le vendit, en 1675, à MM. Rancilhac de Chazelles et Teillard de Chabrier, après lesquels il échut à la branche des Teillard, qui en prirent le nom par arrangement de famille. Beynac appartient aujourd'hui à la famille Teissèdre, de Murat.

Ce fut près du village de Beynac qu'eut lieu , en 1635 , suivant l'histoire de l'abbé Teillard, curé de Virargues, le combat furieux qu'on appela la bataille des esclops (bataille des sabots), parce que les insurgés, pour fuir avec plus de vitesse, laissèrent leur chaussure sur le terrain de la lutte. Voici comment M. Bouillet, dans sa description de la Haute-Auvergne, raconte ce fait d'après l'auteur que nous venons de citer:

« Beynac fut témoin d'un combat entre les troupes du roi et les paysans, soulevés par l'impôt du pied fourchu.

Isaac Dufour, originaire d'Allanche et habitant de Murat, s'étant rendu partisan de la levée des droits menus (imposition portant sur les bêtes au pied fourchu) et ayant voulu exiger ces droits, éprouva de la part des paysans des montagnes une forte opposition ; il y eut à cette occasion plusieurs assemblées, qui ne purent empêcher le peuple de s'armer et de se soulever. Des troupes furent envoyées contre eux et les poursuivirent vigoureusement. Trois rencontres eurent lieu : l'une à St-Saturnin-des-Montagnes , la seconde aux Alintines (l'abbé Teillard dit Valentine), et la troisième à Beynac-en-Planèze. Les troupes du roi massacrèrent dans cette rencontre plus de 400 paysans et en blessèrent un grand nombre d'autres. Les sieurs Trève de Dienne et Veissière  de Murat y furent faits prisonniers. Le premier se tira d'affaires; mais l'autre,  qui s'était rendu le chef de la populace, fut pendu. »

Le Moulin-de-Celles, hameau.

La Champ, village entre Coltines et Ussel, dans la plaine. La Champ est nommé dans la charte de Clovis comme étant une métairie occupée par le serf Arboimes, dont la redevance envers ce prince était d'un bœuf, six deniers et une mesure de froment.

Le Moulin-de-Chanteroune, hameau.

La Choulou, village sur la route de Massiac, dominant l'Allagnon.

Girallat, hameau.

Longuesaigne, hameau.

Ribes ou Rives, village qui a donné son nom à la famille de ce nom. Ithier de Ribes était seigneur du lieu en 1312, ainsi que de Beynac et du Jarrousset. Nous venons de rapporter comment cette famille s'éteignit dans la personne de Bégon, qui n'eut que trois filles. Dans la charte de Clovis il est dit qu'à Ribes il y avait une métairie habitée par le serf Traldald , qui donnait un bœuf et faisait des charrois. On voit à Ribes des traces d'anciennes constructions.

Ribette. village près de l'AHagnon.

10° Secourioux, village vers Coltines.

1I° Traverges, village sur l'Allagnon.

La commune de Celles fut comprise dans la répartition de l'impôt de 1696 pour la somme de 4,850.

La circonscription de cette commune a suscité des réclamations. Les deux villages de Beynac et de la Champ , qui se trouvent sur le plateau de la Planèze, éloignés du chef-lieu, mais assez voisins d'Ussel, se rendent habituellement pour leurs exercices de piété dans cette dernière localité; bien plus , ils viennent y enterrer leurs morts. En 1850, le Conseil municipal a été saisi de la question du transfert du chef-lieu à Ribes, comme point plus central, ou de la réunion des deux villages à Ussel. Aucune solution n'a été donnée jusqu'à ce jour à ces réclamations importantes.

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