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La commune de St Julien de Jordanne aujourd'hui

Document tiré  du Dictionnaire Statistique du Cantal de Déribier-du-Chatelet  Edition de MDCCCLII  (1852) Volume 1/5.

Ces pages ayant été numérisées nous ne pouvons garantir une fidélité exacte à 100% du texte malgré le soin apporté à sa correction. 

 

Julien-de-Jordanne (st). — Cette commune, formée par une loi du 5 juillet 1845, dépend de l'arrondissement et du canton nord d'Aurillac.

Elle a pour limites : au nord et sur les crêtes de la montagne, la commune de St-Projet ; au sud et aussi dans la montagne, celle de Thiézac; à l'est, Mandailles, les ruisseaux de la Garnerie et de la Gourguerie entre deux; à l'ouest, St-Cirgues, dont la séparent les ruisseaux d'Aubusson et du Champ. Elle est presqu'entièrement renfermée dans la pittoresque vallée de Jordanne.

Celte rivière baigne son territoire et s'y réunit à mille ruisseaux et torrents qui descendent des deux revers de la montagne, principalement du revers méridional; ces cours-d'eau tombent bruyamment de cascade en cascade, découpant en tous sens le sol et formant à chaque pas des vallons pleins de fraîcheur, de verdure et d'ombrages. Le frêne , le hêtre, le tilleul, l'ormeau, le sycomore, le sorbier, le coudrier, l'aulne, l'érable, le troène et beaucoup d'autres arbres ou arbustes prospèrent sur toutes les pentes, jaillissent de tous let rochers et les couvrent de leurs touffes épaisses. Encadrées par ces rideaux de feuillage, ondoyant dans les plis des vallons, enveloppant tous les monticules inférieurs, des prairies couvertes d'une herbe abondante et vigoureuse, dessinent de toute part leurs formes capricieuses; çà et là sur leur beau tapis se détache un gracieux bouquet d'arbres , un rocher à physionomie grotesque, un hameau romantiquement placé, brillant de vie et de couleur, et jetant comme un sourire à l'abîme qui .s'ouvre à ses pieds, au flot qui s'y brise avec une sorte de fureur sauvage. Rien de plus varié que la flore de cette riante contrée. On dirait un archipel de fleurs émaillé d'orchidées pourpres, blanches ou roses, de campanules, d'asphodèles, de gentianes, de renoncules, de narcisses, de balsamines, de luzules, tandis que l'arnica-montana fait briller son grand disque d'or sur les bruyères dés sommets, que l'airelle-myrtille y cache ses fruits, que la fraise rougit les bords mousseux des forêts, et que l'aconit élève sa tige grande et svelte sur le torrent.

Telle est la vallée. Faites maintenant surgir au bord méridional de gigantesques rochers qui s'élancent perpendiculairement du sein des bois jusqu'à la cime des monts, avancent leurs fronts sourcilleux ou semblent projeter de sombres draperies sur l'abîme; cherchez au nord les crêtes dures et âpres de Chauveroche, courant près des cieux, et laissant descendre vers les premières zones de la culture des arêtes osseuses alternant avec des ravins , comme pour jeter parmi les fleurs des images de mort et de ruine; étendez vos regards vers cet horizon, pour ainsi dire royal, dont les superbes créneaux terminent à peu de distance la vallée, ou suivez à l'opposé cette même vallée fuyant comme une vague houleuse dans les sinuosités d'un détroit profond, vous aurez le tableau, vous aurez le cadre; vous verrez St-Julien, vous verrez notre Auvergne dans toute la splendeur de sa nature, unissant l'image riante et gracieuse aux effets imposants et sublimes, relevant un paysage de Claude-le-Lorain parle trait solennel de Salvator Rosa ou de Calame.

Parmi les rochers les plus curieux de la commune, il faut citer le Roc-de-Combières, pain de sucre basaltique et d'une grande hauteur, situé entre les villages de Laveissière et de la Reveilladie.

Les rochers de Las-Lières, dessinant du même côté une sorte d'amphithéâtre composé de deux corniches superposées.

Au sud du bourg, le Rocher-de-Chagge, coupé à pic du côté de l’ouest. On voit non loin de là une caverne dont la profondeur est inconnue.

Aussi vers le sud, le Roc-de-l’Abbas, qui sert de cadran solaire à St-Julien. Du haut de ce rocher on aperçoit très-distinctement Aurillac.

Le Roc-de-l'Issouradou, aimé des bergers qui vont y prendre le frais dans les grandes chaleurs.

Ces rochers sont nus au sommet, boisés de hêtres sur leurs flancs, et donnent naissance à plusieurs ruisseaux et torrents.

Le sol de la commune de St-Julien touche aux volcans; c'est assez dire quelle est sa nature. Il est riche en prairies et en pâturages de montagnes; mais on y voit que peu de terres. De grands bois ou des taillis de hêtres revêtent les pentes méridionales. Ces bois ne s'exploitent que difficilement, à cause de la déclivité du terrain. La plus grande partie d'entr'eux est communale.

Les habitants de St-Julien possèdent aussi de vastes communaux en montagnes, où ils font pacager leurs troupeaux de vaches et de moutons. Il y a dans la commune quinze vacheries composées de quarante, trente et vingt vaches chacune. On y fait hiverner de cinq à six cents têtes de bétail. Le principal revenu du pays consiste en fromage et dans l'élève des bestiaux.

Les loups paraissent fréquemment dans la commune et y font des ravages; le lièvre y abonde; les bois et les rochers renferment beaucoup de tanières de renards; le blaireau s'y montre souvent. Les ramiers peuplent les bois; on y voit aussi de grands oiseaux de proie.

La population de St-Julien se compose de 428 habitants, répartis dans 7 villages, 6 hameaux et 91 maisons. Cette population émigré. La plupart des émigrants vont à Paris ou à Lyon, se livrent à l'industrie des métaux ou se font brocanteurs, et réussissent à gagner des capitaux considérables qu'ils rapportent dans leur pays. Pendant leur absence, les femmes cultivent la terre. Cette population est éclairée, a beaucoup voyagé, néanmoins garde des mœurs douces et honnêtes.

Le bourg, St-Julien, situé à 2 myr. 6 kil. d'Aurillac, s'élève à quelque hauteur au-dessus de la rivière; il occupe une position gracieuse et d'où l'on découvre un horizon des plus grandioses. Les maisons qui le composent sont au nombre dé trente-cinq. Un incendie ayant dévoré trente-une d'entr'elles, le 23 avril 1839. ces maisons ont été rebâties à neuf, couvertes en tuiles rouges, de forme plate, et présentent un coup-d'œil élégant.

Le bourg de St-Julien était déjà connu en 1325; une famille de St-Julien l'habitait alors; il dépendait de la terre de La Peyre.

L'église a pour premier patron saint Julien-de-Brioude, martyr; elle reconnaît pour second patron saint Joseph, auquel elle fut aussi dédiée dès sa fondation, en 1731.

Cette petite église ou plutôt cette chapelle était annexe de Saint-Cirgues-de-Jordanne; elle fut érigée en chapelle vicariale, par ordonnance royale du 29 décembre 1831, et en succursale, par ordonnance du 31 mai 1840.

Par suite de l'érection en succursale, cette église était trop petite pour servir aux besoins spirituels de la paroisse. On a dû par conséquent en construire une nouvelle dont le plan est très-beau; elle aura la forme d'une croix latine; sa longueur sera 4e 20 mètres, sa largeur de 6 mètres. La première pierre a été posée le 29 mai 1855 par M. Delcusy, archiprêtre, curé de St-Géraud, d'Aurillac, au milieu d'un nombreux clergé; on a scellé dans cette pierre une médaille de l'Immaculée-Conception.

Les villages et hameaux de la commune sont:

Anterrieux, village au nord-est du bourg. C'était un petit fief qui appartenait, au XVI° siècle, à N. Jarrige, écuyer, et plus tard, à N.-Antoine de Beral, originaire de Murat.

Aubusson, village assez important, à l'ouest. En 1407, il appartenait à noble Bertrand de Saillans, seigneur de Ventailhac. François de Saillaus, seigneur d'Aubusson, maria, en 1596, sa sœur Marie avec Philippe de Chevlade; un de ses descendants possédait Aubusson en 1610. En 1666, les rentes d'Aubusson appartenaient à Anne du Couderc de Fracor, qui les vendit à N.-lIélis du Verdier, bourgeois d'Aurillac. Bernard du Verdier était seigneur d'Aubusson en 1684. Par alliance, ce fief passa à la famille Canteloube de Marmiès. Il y avait une chapelle à Aubusson; mais elle était déjà ruinée en 1756. Ce village, situé près des montagnes de Bertrande, a été indiqué à tort comme dépendant de St-Cirgues.

Le Champ, hameau à l'ouest, près de la rivière et du chemin d'Aurillac.

La Combe, hameau au midi.

L'Estival, hameau au nord.

Feljadou, village au nord.

Laveissière, village au nord-ouest.

Perruchez, village au couchant, près du chemin d'Aurillac et dominant la rivière.

11 y a au-dessus de ce village une source dont les eaux sont bien connues dans le pays; elles jouissaient anciennement d'une certaine réputation, puis furent négligées jusqu'en 1760, où des fouilles firent découvrir le bassin de la fontaine, large de cinq à six pieds et bien cimenté. On a fait faire une cuve où elles jaillissent du pied de la montagne; elles coulent ensuite dans un autre bassin. Ces eaux possèdent des propriétés médicales importantes; elles ont été analysées à diverses reprises (V. Eaux minérales, 5° liv.), et récemment par un chimiste très-distingué de Paris. D'après cette analyse, elles contiennent sur un litre d'eau:

 

En combinant les acides avec les bases, on trouve:

Carbonate de soude                                       1,235 grammes.

Carbonate de potasse                                     0,005

Sulfate de potasse                                             0.100

Chlorure de potasse                                          0,010

Carbonate de magnésie                                  0,290

Carbonate de chaux                                         0,195

Silice et oxide de fer (1oxide de fer pour 1/5) 0,050

En outre, l'eau de Perruchez contient de l'acide carbonique libre qui n'a pas été déterminé. Aussi les carbonates alcalins doivent être considérés comme étant à l'état de bicarbonates.

Cette eau est incolore, inodore, piquante, agréable à boire; elle se trouble par l'ébullition, décompose le vin et purge les buveurs. La source est très-abondante et très-fréquentée dans la saison d'été; on exporte de l'eau à Aurillac, où elle est appréciée, moins cependant qu'elle mérite de l'être.

  9° La Reveilladie, village à l'ouest.

10° Le Salet, hameau sur le chemin d'Aurillac.

11° Sarron, hameau au nord-ouest.

12° Tralabre, hameau au sud-est.

En outre de la source minérale de Perruchez, il y a dans la commune de St-Julien une autre source dite de Foulon qui paraît avoir les mêmes propriétés et à peu près le même goût; elle est beaucoup moins abondante.

 

H.de L.

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