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  La commune de St Martin sous Vigouroux aujourd'hui

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Martin-sous-Vigouroux (st).

 

— Celte commune dépend du canton de Pierrefort et de l'arrondissement de St-Flour. Elle est dans sa forme, très-allongée du nord au sud, et se trouve bornée au nord par celle de Brezons; au sud, par la rivière de Brezons el la commune de Paulhenc; à l'est, par la même rivière el Pierrefort; à l'ouest', par le ruisseau d'Irondel, qui la sépare de Narnhac et de Malbo, et enfin par le département de l'Aveyron.

La surface de son territoire est de 4,900 hectares, dont 600 h. en terres cultivées; 900 h. en prés et pacages; 300 h. en bois essence de hêtre en presque totalité: el 100 h. en terres vaines et rochers. Elle est arrosée par la rivière de Brezons, les ruisseaux d'Irondel et de Montréal, etc.

Sa population est de 858 habitants, répartis dans 10 villages, 21 hameaux et 175 maisons.

St-Martin, le chef-lieu, est un joli village à 3 kil. de Pierrefort et à 2 myr. 8 kil. de St-Flour. Il est entouré d'arbres, et les coteaux qui l'entourent sont tous boisés. Il est situé dans une petite anse formée à l'ouest par une légère retraite de ces coteaux, dans une gorge assez profonde, presque au confluent du ruisseau d'Irondel avec la rivière de Brezons, et sa plaine, qui domine légèrement le fond de la vallée, est peu étendue, mais très fertile. Elle est traversée par la route de St-Flour au Mur-de-Barrès, passant par Pierrefort.

L'église de St-Martin parait ancienne, mais sans architecture caractérisée; elle n'indique aucune époque pour sa construction; elle est bien entretenue, el il s'y trouvait dans une chapelle le caveau de la famille de Lastic de Vigouroux. Elle dépendait en partie du monastère de Sauxillanges auquel elle fut donnée, en 1131, par l'évêque de Clermont. Pierre IV, vicomte de Murat, céda, eu 1265, au prieuré de St-Flour, les droits qu'il possédait sur l'autre partie, et dota cette église de nouvelles rentes. St-Martin était pour la présentation au chapitre de St-Flour. N. de Sistrières dit qu'il s'y trouvait une communauté de prêtres au nombre de sept ou huit, parce que cette paroisse est fort étendue, et qu'elle possédait plusieurs cens et rentes dans la châtellenie de Vigouroux, suivant l'hommage de 1538.

Jean Chambon fui recteur de St-Martin en 1454; Pierre Jarrige, en 1484; Jean Coneilguergue, curé en 1681 ; Jacques Chauliaguet, en 1595; Guillaume Belluge, en 1688; Jean-Jacques Belluge, en 1735; Balthazar, Charles, en 1768

St-Martin dépendait du mandement de Vigouroux, membre de la vicomté de Murat. Après la confiscation de cette vicomté par le roi, il suivit le sort de ce mandement; il fut compris par le roi Louis XIII, par sa donation du 17 novembre 1641, dans l'apanage qu'il constituait à messire Honoré de Grimaldi, prince de Monaco.

Les villages et hameaux de cette commune sont:

Les Arjallier, hameau.

Le Banou, hameau.

Barrés, village.

4° Beaulieu, hameau.

Belair, ferme qui était à la maison de Lastic, sur la plaine vers Vigoureux, appartenant aujourd'hui à M. Bory.

.Belleviste, hameau.

Billiès, village dominant la rivière de Brezons, vers la limite du département.

Les Bonnets, hameau.

Les Bosquets, hameau et moulin.

10° Boutelou, hameau, sur la rivière de Brezons.

11° Boulet, village au nord du bourg.

12° Buzer, village au sud du bourg.

13° La Calmette, hameau.

14° Chapus, hameau.

15° Chansonnier, hameau.

16° Croules, village dominant St-Martin

17° La Descols ou la Dascols, village au milieu de la plaine, au sud du bourg, ll était, en 1600, un petit fief appartenant à Guillaume de la Volpilière, prieur de Talizac, qui en fit don à Tristan et Rigaud, ses neveux. Il passa, en 1609. à Raymond Tourret, par son mariage avec Gabrielle de la Volpilière. Leur fils servait, en 1646, comme capitaine au camp de Trêves. Suivant M. Déribier, le Sr Tourret aurait déclaré à M. de Fortia, en 1666, que ses titres avaient été pillés et enlevés, en 1592, lors des guerres civiles. Procès-verbal en fut dressé par Raymond Tourret, son père, et représenté en forme. Suivant une note que j'ai reçue de l'un des auteurs du Nobiliaire d'Auvergne, la chose ne se passa pas ainsi Selon sa version, il résulte du travail dressé par M. de Fortia, que Jean Tourret, seigneur de la Descols, déclara qu'il n'était pas noble et fit acte de désistement (folio 32 de l'élection de St-Flour). Marc Tourret, seigneur de la Descols, en 1693, fut appelé au service pour le ban de cette année. Au reste, cette qualité de non noble ne diminuait en rien le mérite des services de cette famille, ni la considération dont elle pouvait jouir, et ne mettait aucun obstacle à ce qu'elle possédât des fiefs.

18° L'Escure, château bien situé sur un monticule peu élevé en saillie de trois côtés sur la vallée de Brezons, et se rattachant par le quatrième au coteau boisé de la rive ouest de la rivière. Cette habitation n'est abritée par rien contre les vents du nord qui descendent du Cantal. Néanmoins, ses jardins, préservés par les bâtiments, produisent des fruits en abondance.

Ce château, construction en partie du XV° siècle, se composait d'une immense tour en forme de carré long, élevée de cinq ou six étages, dont plusieurs étaient voûtés. Une belle galerie occupait la largeur de cette tour. De là on montait du rez-de-chaussée au premier étage par un escalier en pierre sans rampe, large au plus de 50 centimètres et fermé par une trappe. Quant aux étages supérieurs, on y arrivait à l'aide d'échelles que l'on remontait vers soi quand on y était établi. La tour était couronnée par un encadrement de meurtrières et de mâchicoulis.

Sur la galerie qui servait de salle de réunion, s'ouvrait la porte de cinq ou six capucinières, petites chambrettes, dont chacune était éclairée par une croisée fortement grillée. Lorsque les temps furent devenus plus paisibles, on construisit un nouveau corps de logis en équerre avec la tour, et au premier étage duquel étaient des appartements plus confortables. Au reste, cet ensemble de bâtiments existe encore tel que nous venons de le décrire.

A l'époque de la terreur, un rassemblement désordonné se porta sur le château de l'Escure et abattit la toiture de la tour. Elle fut rétablie longtemps après par M le comte Joseph de Lastic de Vigouroux, son propriétaire.

Entouré de très-belles prairies et de bois considérables par leur étendue. l'Escure était une des habitations les plus agréables de cette contrée. Il y avait une chapelle. Comme il ne fallait que quelques minutes pour descendre à la rivière très-poisonneuse en cet endroit, on avait construit, dans un des bâtiments d'exploitation, un vaste réservoir alimenté par une source abondante, dans lequel on conservait toujours d'excellentes truites.

M. de Sistrière dit que la terre et seigneurie de l'Escure appartenaient primitivement a la famille de Brezons. Mme la duchesse d'Harcourt, héritière des Brezons, était suzeraine, en 1668, d'une partie. L'autre partie relevait en fief de la châtellenie de Vigouroux. Elle se composait de tout ce qui était au-delà de la rivière du côté de ce mandement, suivant les hommages rendus ez années 1538-1609-1659 et 1668.

Guillaume de Cardaillac, aidé parles Anglais, pilla, en 1364, le château de l'Escure, quoiqu'il dépendit de la vicomté de Murat.

Le seigneur de l'Escure assista au traité passé à Saint-Flour, le 15 mai 1588, pour la pacification du haut-pays.

L'Escure appartenait donc primitivement à la maison de Brezons. Dès l'an 1297 cette seigneurie était la propriété de celle de Gasc ou Gasquet, qui la possédait encore en 1388. Mondot (diminutif de Raymond) du Gasquet, gentilhomme du duc de Nemours, seigneur de l'Escure, fut exempté du ban par le roi, le 15 avril 1475.

Elle vint ensuite à la maison de Bonnafos, seigneur de Roussille et de Bellinay.

Guillaume de Lastic, Sr de la Fontio, quatrième fils d'Annet II de Lastic de Vigouroux, devint propriétaire de Lescure, en 1714, par suite de son mariage avec Marguerite de Bonafos. Son petit-fils, Hugues de Lastic, syndic de la noblesse à l'assemblée provinciale d'Auvergne, en 1787, fut exécuté révolutionnairement à Paris, en 1795, comme conspirateur des prisons. Son frère, Pierre de Lastic, évêque de Rieux, émigra et mourut au Mont-Serrat, en Espagne.

La terre de l'Escure passa après la mort de Hugues à Joseph de Floirac-Gourdon, non petit-fils, qui la vendit au comte Joseph de Lastic de Vigouroux, le 10 juillet 1810; ce dernier la vendit aussi au sieur Bousquet, qui la possède actuellement.

Nous n'avons pu éclaircir comment la seigneurie de l'Escure était advenue à M. de Voltaire à titre de bail amphithéotique. Nous savons seulement qu'ayant refusé de recevoir le remboursement de sa créance, M. de Lastic gagna son procès en parlement.

19° Feydots, village. On pense que la racine de son nom est celtique, et a pu indiquer dans les premiers temps un évènement important.

20° Ubregeal, petit village adossé dans la plaine, à la naissance d'un monticule (puech),el a son aspect sud, sur la limite de la commune, vers le ruisseau d'Irondel. Son territoire est fertile. Sistrières dit que François de Tourret, Sr des Crouzots, résidant au village de Lébregeal, suivant l'hommage de 1668, tient en franc fief et noble dépendant de la châtellenie de Vigouroux, savoir : sa maison, grange, jardin et  curtils, onze œuvres de prés, seize septerées de terre et un bois taillis contenant vingt cartonnées. Le surplus de la métairie est en roture et dépend de ladite châtellenie. Suivant ls répertoire des hommages de Carlat, tiré de chez Delmas. en 1668, Antoine d Humières avait un fief à Lébregeal.

21° Liadières, village.

22° Mejansac, village à mi-coteau, au sud du bourg.

23° Moulin-Haut, hameau.

24° Rouliome, hameau.

23° Sansonnet, hameau.

26° La Varaine , hameau

27° La Volpilière , hameau et château qui a donné son nom à l'une des familles les plus anciennes et les plus illustrées de la province. N. Poncet de la Volpilière vivait en 1086. La descendance de Poncet ne se retrouve pas. Pierre de Gascq était seigneur de la Volpilière en 1281 ; mais on ignore comment se fit la transmission de l'une à l'autre famille. Pons de Gascq fit, en 1343, hommage au vicomte de Carlai pour son château nouvellement bâti, t'elte branche de la famille de Gascq finit dans la personne d'Armige, mariée, en 1346, à Guillaume de Greil, qui joignit alors à son nom celui de la Volpilière. Gaspard de Greil épousa, en 1720, Marguerite Cat ou Chapt de Bastignac, seigneur de Messilhac. Leur fils fut institué héritier par Joseph Chapt de Rastignac, son oncle maternel, et vint se fixer-au château de Messilhac. La Volpilière appartint, jusqu'à la révolution de 1789, à la famille de Greil. Le château fut dévasté, en 1793, par la même bande terroriste qui s'était portée sur celui de l'Escure. Il est maintenant en ruines, et ses bâtiments d'exploitation sont aujourd'hui la résidence d'un cultivateur. (Voir le Nobiliaire d'Auvergne sur ces différentes familles.)

Le château de la Volpilière, en 1717, était composé d'une grosse tour carrée, à quatre étages divisés en pièces voûtées avec des balcons sur la rivière qui coule en dessous. Placé à mi-coteau, sur le versant sud du vallon du côté de Pierrefort, il dominait la vallée; la vue s'étendait au loin et était très-riante. Cette tour était plus élevée autrefois; elle fut baissée d'un étage, et le toit au lieu d'être pointu fut refait en appentis. Il y avait des mâchicoulis, des herses, des meurtrières et des canonnières. Une partie s'écroula de vétusté en 1707. A la voûte de la grand'salle on voyait l'écusson armorié de la famille de Greil. Le corps de logis était flanqué de deux tours rondes près de l'ancienne En 1688, François de la Volpilière fit bâtir un autre corps de logis avec une galerie pou: la communication avec les divers appartements. La chapelle se trouvait au troisième étage. Elle possédait des rentes et des fondations pour toutes les fêtes de l'année. A gauche du corps de logis on avait construit un escalier à deux rampes, dont la balustrade était en pierre de taille; il servait à communiquer aux galeries, et du là dans tout le château ; quant à la grosse tour carrée, on y montait par un très-petit escalier.

Une vaste cour était au-devant des bâtiments, et l'on y entrait par cinq portes. Il y avait aussi une avant-cour où se trouvaient les écuries et bâtiments d'exploitation. Un vaste jardin bien planté d'arbres fruitiers, un vivier et de vastes prairies entouraient le château ; à leur suite était une forêt de 250 hectares. Cet ensemble rendait ce château l'un des plus remarquables du haut-pays.

La Volpilière resta dans le parti du roi pendant la Ligue.

28° Vigouroux est un village d'une cinquantaine de feux, contenant 300 habitants.

Il se trouve sur la route directe de St-Flour au Mur-de-Barrès; mais la route de grande communication faite depuis peu, passant par Pierrefort, le laisse à une assez grande distance à droite. Il est situé à la naissance de la plaine qui couronne la vallée de Brezons, sur la rive droite de cette rivière; son assiette est légèrement inclinée vers cette vallée, et vient s'arrêter sur la crête d'une roche basaltique, abrupte et informe

Le nom de Vigouroux lui aurait été donné d'un château fort qui s'y trouvait, lequel était entouré de trois côtés par le rocher à pic dont nous venons de parler; il ne tenait à la plaine que par une langue de terre. Suivant l'étymologie que l'on voudrait donner à ce nom, elle serait puisée dans la langue vulgaire; Vigoureux (ou te vigoureux), résultant de sa force.

Il aurait existé très-anciennement une famille du nom de Vigouroux. Elle aurait quitté cette résidence vers le XII° siècle. Gilbert et Falcon de Vigouroux firent des donations à l'abbaye de Valette, en H4O. Guillaume de Vigouroux possédait le château de Branzac, commune de Loupiac, en 1206, Caylus et partie de St-Christophe.

Ce fut probablement vers la première de ces époques que le château de Vigouroux devint le chef-lieu du mandement de ce nom, compris dans la vicomte do Mural; car nous trouvons qu'en 1150 cette terre appartenait à Pierre II, vicomte de Murat, qui soumit ce château à Raymond Béranger, dit te jeune, comte do Provence et vicomte de Carlat.

Marquèze de Peyre, veuve de Pierre IV, vicomte de Murat, rendit au nom de se? enfants, en 1273, à Henri II de Rodez, vicomte de Carlat, l'hommage pour le château de Vigouroux.

Dans le traité passé à St-Flour, en 1285, sous la médiation de quarante gentilshommes ou ecclésiastiques, le vicomte de Murat reconnut tenir la seigneurie de Vigouroux en fief du vicomte de Carlat.

En 1329, Hélis de Murat, en épousant Bertrand de Cardaillac, reçut en dot 10,000 livres assises sur la terre de Vigouroux.

Lors des démêlés élevés entre Renaud de Murat et les Cardaillac, ces derniers, aidés par les Anglais, commandés par Jandos, vinrent assiéger le château vers l'an 1361, le prirent, le pillèrent et y commirent mille ravages.

La seigneurie de Vigouroux fut attribuée à Renaud dans le partage intervenu entre lui et les Cardaillac ; mais cet acte ne fut pas maintenu, et le vicomte d'Armagnac, en guerre avec Renaud, s'en saisit peu après 1409. La guerre terminée, il lui fut rendu.

Après la condamnation du duc de Nemours, la terre de Vigouroux, qui avait été comprise dans la confiscation, fut donnée par le roi à Jean de Lisle, qui en jouit de 1447 à 1485. Charles VIII la comprit alors dans les biens rendus aux enfants du duc de Nemours.

Vigouroux suivit les phases de la vicomté de Murat : passa à Pierre de Bourbon, fut confisqué sur le connétable et réuni au domaine de la couronne. Sa seigneurie fut comprise plusieurs fois dans l'apanage des reines douairières.

M. de Sistrières dit » que la châtellenie de Vigouroux, membre dépendant de la vicomté de Murat, fut bâillée par le roi, en 1641, à messire Honoré de Grimaldy, prince de Monaco, et unie à celle de Carlat. A raison de cela, le juge prévôt de Vie prétendait, à l'exclusion du juge prévôt royal de Murat, à la juridiction sur cette seigneurie. Le juge de Murat répondait que, quand le roi avait bâillé cette châtellenie, il n'avait rien innové dans les justices, puisqu'il aurait fallu indemniser et payer à leurs justes valeurs les charges des officiers de Murat, ce qui n'avait pas été fait. Il fit donc établir un lieutenant à la résidence de Narnhac, qui rendait la justice lorsque le juge de Murat se trouvait absent, mais avec appel au bailliage de Vic.

Le prince de Monaco jouit de cette seigneurie jusqu'à la révolution.

On ignore l'époque et par quel événement le château fut détruit; car il ne parait pas qu'il l'ait été par Jandos. Le feu y contribua beaucoup : dans les défoncements faits par Mme de Lastic dans les premières années de ce siècle , pour créer un jardin, on trouva beaucoup de grains brûlés. Aussi, quelques souvenirs traditionnels disent qu'il fut incendié par le tonnerre. Ce qu'il y a de probable, c'est qu'il le fut par des assaillants; car, indépendamment d'un certain nombre d'ossements humains, les fouilles faites à cette époque firent trouver cinq squelettes dans un four. Ces travaux découvrirent aussi des fragments de piques, d'armures brisées, de serrures et autres ferrements aussi calcinés.

Il restait, en 1780, un tronçon de tour assez élevé dont la base se voit encore. Il fut démoli, et ses matériaux employés dans la construction des écuries du château actuel. Quant au fort lui-même, sa destruction doit être fort ancienne; car sur ses décombres, dans la partie défoncée, existaient deux énormes tilleuls qui ont été employés à la boiserie d'une des chambres du château.

Au sommet du rocher, protégée par le château et presque enfermée dans son enceinte, se trouvait une chapelle dédiée à saint Laurent. Un chapelain à portion congrue, membre de la communauté de St-Martin, la desservait ; mais, pour les enterrements et les cérémonies paroissiales, ils étaient, malgré l'éloignement, célébrés à l'église principale. Cette chapelle, assez grande pour contenir les habitants du village, et ceux des hameaux voisins, était voûtée; son clocher à peigne, muni de deux cloches existant à la nouvelle église, dont la plus grande était en grand renom dans la contrée. Les habitants de la valide de Brezons avaient la croyance que son action sur les orages était grande, et, de quelque épaisseur que fût la nue, qu'elle était fendue quand on la sonnait. Elle avait même un pouvoir sacré sur les sorciers; car bien souvent on avait vu ces êtres diaboliques et malfaisants culbutés, mis en fuite par sa vertu toute puissante et disparaissant dans des abîmes inconnus. La bande dévastatrice se porta aussi sur cet édifice, en 1793, démolit en partie le clocher, et ce ne fut que quelques années après que la cloche bienfaisante fut rétablie, comme on put, sur son ancien siége mutilé. Quant à sa sœur, elle avait été transportée à St-Martin, où elle resta jusqu'à la construction de l'église actuelle.

Au rétablissement du culte, Vigouroux obtint une succursale; mais son ancienne église, ébranlée par la dévastation, ayant ses voûtes lézardées par suite de l'influence atmosphérique d'un climat aussi rude, plus l'humidité provenue des infiltrations d'une toiture mutilée, s'écroula pendant une nuit et tomba d'une pièce, ce qui fit que personne n'y périt. On fut assez longtemps à choisir un emplacement convenable pour l'érection de la nouvelle église. Du bord du rocher, elle a été transférée dans la partie haute du village et conservée sous ie même vocable; mais sa cloche, quoique réunie à sa sœur, a perdu une partie de ses privilèges: les sorciers ne sont plus chassés par elle. Ce qu'il y a de certain sur cette action , c'est que, tant que la sonnerie a existé sur l'ancien clocher, le tonnerre tombait fréquemment autour du château moderne au lieu que dans l'état actuel, ce fait arrive très-rarement.

Vigouroux, en bâtissant son église, a construit aussi un modeste presbytère; il est assez éloigné et plus bas dam le village.

En 1729, les habitants de ce village présentèrent une requête au chancelier de France pour obtenir leur séparation financière de la paroisse de St-Martin. Les motifs allégués étaient les intempéries de la saison, qui rendaient les communications difficiles pendant plusieurs mois de l'année, les mauvais chemins, une grande distance et une rude cote à descendre ; ils alléguaient encore qu'ils avaient une chapelle dans laquelle on disait la messe les dimanches et jours de fête.

Près de l'ancien fort se trouve le château moderne. Son architecture ne dénote aucun signe par lequel on puisse fixer l'époque de sa construction. Il est formé de trois tours encadrant deux corps de logis. Celle du milieu renferme l'escalier; celle à l'ouest est portée presque depuis la terre par un cul-de-lampe. Toutes les croisées s'ouvrent à l'aspect du midi; elles sont grandes, mais sans croisillons; le panier à salade ne les a jamais sauvegardées. Les tours n'ont ni meurtrières, ni créneaux, ni mâchicoulis. Cet ensemble indique une époque de tranquillité. Annet V de Lastic y ajouta , vers 1720, un nouveau corps de logis en équerre avec la tour de l'est.

Les matériaux de l'ancienne forteresse ont dû servir a la nouvelle construction.

Extérieurement et au-dessus de la porte de l'escalier était sculptée on relief une Annonciation. Les vandales qui profanèrent l'église ne l'épargnèrent pas. On reconnaît encore le sujet, mais toutes les statues ont été mutilées à coups de marteau.

Cette porte est fermée par un assemblage de plateaux en bois de chêne, recouvert par des plaques de fer d'une forte épaisseur ; le milieu est percé par un biscaïen. La serrure est d'un travail antique fort remarquable, ainsi que les verrous. On pense que cette porte est celle de l'ancien château.

De beaux jardins, de belles allées en terrasse dominant la riante vallée de Brezons, une vue très-étendue font de Vigouroux une charmante habitation pendant quatre mois de l'année.

Des propriétaires anciens du château moderne, nous ne trouvons mentionnée que la famille Berthomier.

Jacques de Berthomier, écuyer, seigneur de la Vernhiette et de la Fontio, maria en 1617 sa fille, son héritière, avec Annet I" de Lastic , seigneur de Belmur, d'Auzolles et de Latbérisse. Annet était fils de Jacques de Lastic, seigneur do Jarry. C'est ainsi qu'est venue se fixer à Vigouroux cette branche importante de cette maison On ignore depuis combien de temps la famille de Berthomier résidait dans cette localité; mais comme elle était riche , il est probable que le château moderne avait été construit par elle. Toutefois, elle n'avait aucun droit féodal sur Vigouroux. Nous avons donné les différentes phases de la transmission de cette seigneurie.

On lit dans M. de Sistrières: « Annet de Lastic, écuyer, sieur de Belmur, tient en fief de la châtellenie do Vigouroux douze septiers de blé de rentes et un septier de froment aux villages de la Fontio et de Faveyrolles; plus au village de la Vernhette, la rente de six septiers de seigle et les laydes, le septier de huit cartons; plus au village del Bousquet, une métairie appelée de Sarrus. »

Depuis 1617 jusqu'à nos jours, ce rameau des Lastic a constamment résidé à Vigouroux; il a produit la branche existant aujourd'hui à Naxos. François de Lastic, fils d'Annet II et de Marie de la Volpilière, fut son auteur, en 1708. Son fils, Jean-Baptiste, était major général du prince Ragotti et vint résider à Naxos. Philippe I° eut le gouvernement d'une province russe. Le représentant actuel est Philippe II de Lastic, consul de France à Naxos.

Nous venons de voir à l'article l'Escure ce qui concerne la branche de ce château. Quant à celle de Vigouroux, elle s'est transportée en Limagne et réside à Parentignat. Le comte Joseph-Annet de Lastic , page de Louis XVI, membre de la coalition d'Auvergne, émigré, chevalier de Saint-Louis, chambellan de l'impératrice Joséphine, inspecteur général des Haras et député du Cantal, a réuni les deux branches de Sieujcac et de Vigouroux par son mariage avec Mlle de Lastic.

Une coïncidence assez singulière, c'est que le comte Joseph de Lastic était le premier page de Louis XVI, en 1791, et que son fils, le marquis Tony de Lastic, l'était de Charles X lors de la révolution de 1830.

Le comte Joseph de Lastic a vendu son château et sa terre de Vigouroux au sieur Beaufils-Coste, qui en est le propriétaire actuel.

François de Lastic, capitaine au régiment d'Auvergne, oncle de Joseph, habitait Vigouroux avec sa femme, qu'il avait épousée en Flandre. L'un et l'autre y sont morts sans enfants.

La dernière génération des Lastic habitant Vigouroux est descendue dans la tombe; la vieille race a été enlevée par la plaine à la montagne. Cendres de mes pères, le gazon qui vous recouvre ne fléchira plus sous la pression du genou de vos enfants venant soupirer la prière du souvenir ! Vos descendants ne dormiront pas leur sommeil près de vous! Encore quelques jours, et personne dans le pays ne pourra dire : La repose cette noble lignée bienfaitrice de nos contrées!

Le village de Vigouroux a été habité aussi par la famille Cat de Rastignac, qui y possédait des terres et une belle maison. L'un de ses membres a fait avec distinction toutes les guerres de la révolution et de l'empire. Il fut colonel d'un régiment de cavalerie du roi Joseph, à Naples, son écu ver en Espagne et enfin général de brigade.

La famille de Repons, parente des de Greil, avait dans le haut du village une maison ayant une tour. Trois sœurs l'habitaient et ne sont mortes qu'au commencement de ce siècle.

Enfin, la famille d'Artis du Bousquet. L'un de ses membres, magistrat des plus recommandables, est décédé président du tribunal civil à Clermont-Ferrand.

Peu de villages du haut-pays pouvaient présenter une société plus agréable, quand toutes ces familles étaient réunies.

Très-peu au-dessus des dernières maisons du village, sur le point culminant entre les vallées de Brezons et d'Irondel, avait été planté un tilleul, devenu plusieurs fois séculaire. Il y a une vingtaine d'années, son tronc énorme succombait sous la mutilation des âges, et ses branches, usées par les intempéries des saisons, présentaient une décrépitude avancée. Et cependant cet arbre a été un bienfaiteur de l'humanité : aperçu de plusieurs myriamètres à la ronde, il servait de guide au voyageur égaré par la tourmente. Aussi l'arbre de l’Oubret avait un grand renom. Nos ancêtres, prévoyants, avaient planté un autre tilleul près de lui pour le remplacer. Mais, malheureusement le village était pauvre; les planches manquèrent pour les boiseries nécessitées par la construction de la nouvelle église: l'arbre jeune, plein de vigueur, dut succomber. Pauvres voyageurs égarés, vous n'aurez plus l'arbre de Vigouroux!

Il a été parlé, dans la 3° livraison de cet ouvrage (p. 302), de la chasse du Grand-Veneur; le chemin qu'il suivait était assez rapproché du village.

Vigouroux a trois foires, érigées, l'une le 2 juillet, la seconde le 14 septembre et la dernière le jeudi de la mi-carême.

Lieux de ma naissance, je ne vous quitterai pas sans porter un hommage à la madone du rocher.

Lorsque l'on veut descendre directement de la plaine de Vigouroux dans l'espèce d’anse où se trouve St-Martin, on trouve , au petit village de Croûte, une côte dont les lacets rapides serpentent au pied d'une roche basaltique très élevée et à pic. Le voyageur qui parcourt ce chemin aperçoit à sa gauche une légère excavation ou plutôt un enfoncement à mi-hauteur du rocher, dans lequel il entreverra vaguement une forme humaine. Là se trouve la statue de Notre-Damede-St-Martin , vénérée dans toutes ces contrées La légende raconte force merveilles opérées sous l'invocation de la Vierge immaculée. Plusieurs fois , les habitants ont voulu la transporter dans leur église; des hommes entreprenants se sont fait suspendre par des cordes pour venir la retirer; mais chaque fois, dans la nuit, la statue a délaissé la chapelle qui lui était consacrée, et, le lendemain au matin, la vierge du rocher était aperçue dans sa résidence séculaire.

Ce qu'il y a de certain, c'est que l'origine de cette statue est inconnue; que l'époque où elle fut déposée dans l'enfoncement du rocher se perd dans la nuit des temps; mais qu'elle a été constamment entourée de la vénération générale.

La superficie de la commune de St-Martin est fort étendue et commence au pied même du Cantal. Elle est, pour ses produits, partagée en trois zones très-distinctes: la partie haute est en pâtures, en prairies, et donne quelque peu de sarrasin; la partie de la plaine est productive en seigle, avoine et sarrasin; quant a la partie basse, qui est dans la vallée, elle est d'un bon rapport et fournit même quelque peu de froment.

La nature du sol est volcanique et schisteuse.

St-Martin fut compris pour une somme de 2,800 livres dans la répartition de l'impôt de 1696. Il était de droit écrit.

Dans la charte de Clovis il est dit qu'il y a à St-Martin trois métairies occupées par Hunauld et Hildegaire, serfs de Saint-Pierre, « qui paient cinq sous de cens et une vache tous les cinq ans. »

 

P. de C.

 

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