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CONDE SUR LA PIERRE DU TOURNE-BROCHE

La traduction rapporte, et le fait a été consigné dans les mémoires du temps, que lors des guerres de la Fronde, le prince de Condé, qui cherchait à se faire des partisans en Auvergne par le crédit du comte de Charlus, se rendit avec un de ses confidents au château de Chavagnac, chez M. de Ribier-de-Lavaur, et, sans se faire connaître, demanda à dîner. Le châtelain lui offrit de bon cœur ce qu'il eut et l'accompagna chez le comte de Bassignac, où il se rendait; mais ce dernier était absent, et le prince, gardant l’incognito, resta quelques heures assis à la cuisine sur la pierre du tourne-broche. Enfin, le maître du logis arriva, et, suivant l'usage du temps et du pays, fit préparer un bon souper, sans avoir le moindre pressentiment au sujet de l'hôte qu'il devait régaler. A table, la conversation s'engagea sur la politique. Echauffé par le vin, le prince parla très-librement du roi, de la reine-mère, etc. Les choses allèrent si loin, que le seigneur de Bassignac s'emporta et, ne pouvant écouter, de semblables propos, se leva, prit la bouteille et allait la lancer au prince, lorsque l'illustre révolté se mit à sourire et lui dit un mot à l'oreille. Aussitôt le châtelain, confus, de se jeter à genoux et de faire ses excuses!... L'harmonie fut rétablie sans peine entre les convives. Le prince de Condé se fit conduire vers la Dordogne et passa en Limousin, où l'appelaient ses affaires.

On voit encore à Bassignac la pierre du tourne-broche sur laquelle, humblement assis, le héros de Rocroy et de Lens attendit long-temps le seigneur du lieu.