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A mi-chemin entre Murat et Riom-es-montagne, perchée sur un piton rocheux, la chapelle Notre-Dame de Valentine (commune de Ségur les villas) attend votre visite. Elle est fort heureusement ouverte toute l'année.

ND valentine 5 2chapelle Notre-Dame de Valentine

La chapelle, qui faisait partie d'un ensemble castral dont il ne reste rien, a été rebâtie en 1854 (voir le texte extrait du Deribier ci-dessous) en forme de croix latine. Le mobilier (autel, confessionnaux et vitraux) ont été financés par les habitants. Quant aux peintures murales d'inspiration byzantines, elles sont très récentes, elles datent de 1998 et sont dues à des artistes contemporains réunis par le curé de Dienne, l'abbé Rozé.

Petit historique à partir du Dictionnaire Statistique du Cantal (Deribier) :

Valentines, hameau où sont les traces d'un château fort, qui avait reçu le titre de vicomté. Sa seigneurie dépendait de la baronnie de Mercœur. Jean de Valentines, chevalier, vivait en 1289. Marguerite de Peyre, mariée à Raymond d'Estaing, était dame de Valentines en 1338. Béatrix de Murat - Vernines, qui épousa Milès de Pompriers, en Beaujolais, lui porta la terre de Valentines en 1365. Guillaume de Brezons fut seigneur de cette terre en 1419. Il paraît qu'après lui la terre de Valentines revint à la maison d'Estaing et n'en sortit qu'en 1645, époque où François d'Estaing, baron de Murols, la vendit à N. François de Rochemonteix de Nastrac. Elle passa ensuite à la famille Dufour de Prades.

La terre de Valentines était de droit coutumier et relevait de Riom.

Valentines est un pèlerinage en grand renom dans ces contrées, et l'on y vénère une statue miraculeuse de la Vierge. Sur un rocher qui domine le vallon de Ségur existe une chapelle sous l'invocation de Notre-Dame, dont l'existence est constatée depuis 1262, où elle fut dotée d'une rente de 500 livres clermontoises, par Robert Ier, baron de Mercœur, et non par Robert Ier, vicomte de Clermont, qui vivait 500 ans plus tôt(Justel, Chabrol). Cette chapelle dépendait de la Chaise-Dieu. N. Michel de Tournemire en était vicaire en 1410.

Une chapelle aussi isolée, et dans une partie aussi peu habitée de nos montagnes, devait nécessairement avoir une origine merveilleuse. La légende, cette folle de la veillée du village, devait naturellement s'en emparer; suivant elle, un grand personnage, un roi de France même, sans suite et sans guide, se serait égaré dans ces solitudes. Les esshirs de l'hivernie, si redoutables et si fréquents dans ces contrées, l'auraient enveloppé. Il allait périr ne sachant plus quelle direction suivre, lorsque survient une éclaircie ; un rayon de soleil brille , et avec lui une lueur d'espérance rentre dans l'esprit du prince égaré. Il se trouve au pied d'un rocher ; il aperçoit dans une anfractuosité une statue de la Mère des consolations ; se prosterner devant elle, faire le vœu de lui ériger sur ce rocher un sanctuaire, furent l'œuvre d'un moment. Sa prière devait être écoutée ; n'avait-elle pas été inspirée par les angoisses d'une âme en peine! Le temps resta serein, et le grand personnage fut sauvé.

Le fond de cette légende peut être vrai : un baron de Mercœur a pu fonder cette chapelle. Auprès du peuple naïf de nos montagnes, du roi à un baron aussi puissant la différence était légère ; les chefs féodaux n'exerçaient-ils pas toute la puissance du souverain ? On doit de plus tenir compte, pour les accessoires, des embellissements de l'imagination. Il fallait une cause à l'érection d'un édifice religieux dans un lieu si sauvage, loin de toute habitation. Le fondateur avait-il une expiation à faire ? On est disposé dans les classes populaires à prêter des méfaits aux grands seigneurs. Etait-ce l'accomplissement d'un vœu, avait-il reçu quelques grâces particulières, on bien Marie avait-elle marqué cet endroit par quelques prodiges: Marie aime les solitudes de nos hautes montagnes ? Peut-être un peu de tout cela est-il exact! Il n'y a rien de bien surprenant à ce qu'un baron de Mercœur se soit égaré pendant une pérégrination dans la vaste étendue de sa suzeraineté. Après avoir couru un grand danger, dans ces temps où la foi n'avait rien perdu de sa puissance, il dut implorer le secours de la Consolatrice des affligés. Tout est rationnel.

Quoi qu'il en soit, une chapelle avait été érigée sur un rocher battu par toutes les tempêtes, et, bien que l'on y dit la messe parfois, les ravages de six siècles, dans ce climat dévorant, en avaient non seulement rendu l'intérieur inconvenant pour sa destination, mais même ses fortes constructions, ébranlées sur toute la ligne, étaient menacées d'une entière et prochaine destruction. La nécessité de la restaurer, même de l'agrandir, vu l'affluence des pèlerins, se faisait généralement sentir.

Nous avons reçu la communication d'une relation publiée par un ecclésiastique présent à la fête de Valentines, sur les cérémonies qui eurent lieu lors de l'inauguration du nouveau sanctuaire. Nous en donnerons quelques extraits:

Valentines est un pèlerinage qui, de temps immémorial, a été fréquenté par les habitants de la Haute et Basse-Auvergne. Les guérisons miraculeuses s'y multipliaient, les infirmités de tout genre semblaient s'y donner rendez-vous, surtout aux fêtes de l'Assomption et de la Nativité de Marie. Le sanctuaire placé, selon le goût du temps, sur la pointe d'un rocher, offre un point de vue des plus pittoresques. De là, vous découvrez la crête de nos monts gigantesques, tandis que la Santoire coule à vos pieds en serpentant à travers de riches prairies. Ce sanctuaire, foudroyé à plusieurs reprises, en hutte à tous les vents, tombait en ruines, ne pouvait abriter les nombreux pèlerins qui s'y rendaient aux deux grandes solennités. Le besoin de le restaurer se faisait généralement sentir ; mais les ressources manquaient.

Il était réservé à M. l'abbé Chanson, curé actuel de Ségur, sur la paroisse duquel se trouve Valentines, de conduire cette oeuvre à bonne fin. En combinant ses moyens d'exécution, il avait fait très large la part de la Providence, et la Providence ne lui a pas fait défaut. Le site est élevé ; on n'y arrive que par un chemin long, difficile et montueux. La pierre de taille, le sable, la chaux, le bois de construction sont à de grandes distances; cinq mille francs n'auraient pas fait face aux frais de transport; mais les communes de Dienne, de St-Saturnin, de Ségur, ont consacré à l'œuvre leurs bourses, leurs bras, leurs bestiaux. Lorsque le soin des récoltes prend toutes les heures du jour, la nuit est consacrée aux transports; on craindrait de perdre la protection de la Mère commune des chrétiens, si l'on ne s'était pas associé au mouvement général. Aussi ce précieux sanctuaire est devenu une belle église, à construction élégante, avec rond-point, un autel à la romaine en marbre, des chapelles latérales bien décorées, des croisées à trèfle, une voûte coupée par des arceaux habilement disposés, et un clocher dont la flèche est très-hardie. M. Ravenet, dont nous avons parlé à l'article Marcenat, avait dressé les plans.

Mgr l'évêque étant absent, M. Jalabert, vicaire général, en a fait la bénédiction le 6 août, assisté de 25 ecclésiastiques. Plus de deux mille pèlerins y étaient accourus de toutes les contrées voisines. Vue de ce point élevé, la procession, partie de Ségur, présentait un coup d'œil admirable.

Ainsi a été relevée sur cette roche une église que beaucoup de paroisses du diocèse s'estimeraient heureuses de posséder. 

   

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